samedi 16 avril 2011

Soleil levant - SORD


De toutes les sociétés japonaises qui fabriquent des ordinateurs, celle qui est peut-être la plus intéressante compte parmi les moins bien connues : SORD, entreprise de taille moyenne.




Le nom SORD a été formé par contraction des mots Software et haRDware; il est révélateur de la vocation de cette société, qui a toujours accordé autant d'importance à la mise au point de logiciels qu'à celle des machines elles-mêmes.

La firme a connu des débuts modestes. Son président, Takayoshii Shiina, quitta l'université pour entrer à Rikei Industries, société relativement prospère, cotée au deuxième rang, à la bourse de Tokyo, en 1967. Il s'employa à redéfinir la politique commerciale de la société.

C'est en 1970 que Shiina et un de ses amis furent prêts à créer leur propre société. Ils fondèrent donc SORD, avec un capital de 20 000 F. Shiina n'en continua pas moins à travailler pour Rikei jusqu'au mois de décembre de la même année. Les premières réalisations de SORD furent un testeur logique bon marché, ainsi que des travaux de programmation réalisés sous contrat.

Dès 1971, le chiffre d'affaires de SORD atteignait un niveau enviable, toujours grâce, principalement, à des programmes réalisés à la demande. Deux ans plus tard, la société commença à produire du matériel, et à la fin de 1974, elle commercialisait un lecteur de disquettes avec une interface qu'elle avait elle-même réalisée. Ensuite apparut le SMP-80/20, l'un des premiers ordinateurs japonais dérivés de l'Intel 8080.

Le SMP-80/20 connut un succès remarquable, et les commandes affluèrent. Mais Shiina avait de grands projets d'expansion. En 1977, il vendit 20 % des parts de la société à Toppan, l'une des plus grosses imprimeries du pays. SORD disposa ainsi de moyens financiers qui lui permirent de mettre au point des logiciels adaptés à sa gamme sans cesse plus variée d'ordinateurs, dont, en 1981, PIPS.

PIPS était une gamme de logiciels en avance sur son époque. C'était en effet l'un des premiers logiciels intégrés au monde, et c'est surtout lui qui permit à SORD d'acquérir une position ferme sur le marché. PIPS combine trois fonctions (tableau, traitement de texte, et base de données) sous une forme telle que même des personnes n'ayant jamais utilisé un ordinateur pouvaient apprendre à s'en servir en quelques heures.

Les programmes d'usage courant, dans le domaine des affaires, aussi bien en Europe qu'aux États-Unis, n'avaient pas encore fait leur apparition au Japon, pour deux sortes de raisons : tout d'abord, les Japonais répugnant  généralement à importer quoi que ce soit qu'ils puissent faire eux-mêmes, on ne trouvait au Japon que fort peu de logiciels d'origine américaine. En second lieu, les Japonais sont de piètres linguistes. Si un manuel de Digital Research, en CP/M, constitue un document difficile à déchiffrer pour un lecteur européen moyen, c'est pour un Japonais... du chinois! L'absence de programmes d'applications disponibles sur le marché offrit donc à SORD un créneau qu'elle s'empressa d'exploiter.

SORD commença à développer la série M200 d'ordinateurs dérivés du Z-80, puis la série M23. Ensuite, celle des M343 permit de satisfaire une plus large gamme de besoins. Le M5 fut créé pour le marché national des jeux électroniques, et l'on a aujourd'hui la série M68, qui comporte à la fois des processeurs Z-80 et Motorola 68000, les petits ordinateurs d'affaires M243, et le M285 à 32 bits qui permet l'emploi de programmes VAX-11 et est bien adapté à la conception assistée par ordinateurs.

Aucun autre fabricant au monde ne propose une gamme aussi étendue de matériels sur le marché, et chaque ordinateur SORD est vendu avec le logiciel correspondant. Le seul reproche que l'on puisse faire à SORD est de ne vendre, pour ainsi dire, que du matériel « clés en mains », sans qu'il soit possible d'acheter un ordinateur seul. Les clients n'ont donc pas la possibilité d'utiliser des logiciels autres que ceux que propose SORD.

La société japonaise a tenté de remédier à cette carence avec le système SB-80, proposé en option avec la série de ses ordinateurs M23, dérivés du Z-80. Le SB-80 est l'équivalent du système CP/M 2.2 de Digital Research, et permet l'utilisation du logiciel CP/M, pour la.première fois sur un ordinateur SORD. SORD a fait un autre effort dans la même direction en diffusant le p-Système de l'UCSD (University of California at San Diego).

Aux utilisateurs qui se contentent de ses propres logiciels SORD propose plusieurs BASIC performants, son système SB-80, PIPS, et un système de traitement de texte Wang.

SORD s'est également efforcé d'emboîter le pas aux constructeurs de micro-ordinateurs tels que DEC, en proposant des systèmes dont la mise en œuvre est possible sur du matériel domestique. Dans le même temps, une idée s'imposait chez tous les autres constructeurs d'ordinateurs : la standardisation et la compatibilité entre produits de firmes différentes constituent les meilleurs moyens de développer le marché. SORD a, jusqu'à présent, manifesté une certaine lenteur à s'adapter à cette tendance.

SORD n'en continue pas moins à se signaler par des innovations dans le domaine des logiciels, mais on lui reproche souvent de ne fournir à ses clients que des documentations insuffisantes, concernant ses produits. 

Ces deux dernières années, il est vrai, SORD n'a pas ménagé ses efforts en vue d'offrir une bonne documentation sur PIPS et sur son système de traitement de texte. Il semble qu'une documentation approfondie sur ses ordinateurs fasse encore défaut, et SORD n'encourage guère les entreprises qui pourraient créer des logiciels utilisables sur ses machines.

Les années qui viennent seront probablement critiques pour SORD, qui doit faire face à la concurrence de puissants rivaux japonais, comme à celle d'IBM. Pourtant Takayoshii Shiina continue à croire à l'avenir des entreprises de taille modeste, et il est vrai qu'il a su donner à SORD une réputation internationale.


PIPS

PIPS (Pan Information Processing System) est le seul logiciel de gestion de SORD. C'est un programme général destiné à différentes tâches de la gestion des affaires, depuis la comptabilité jusqu'à la représentation graphique. Il démontre une curieuse approche du marketing à la japonaise car il n'est disponible que sur certaines machines de cette société. Cela peut donner une bonne raison pour acheter un ordinateur SORD, mais l'intérêt du produit est limité.


Les options SORD

Les machines les plus connues de SORD sont l'ordinateur domestique M5 et le portable d'affaires M23P. Ce dernier met en œuvre de nouveaux standards pour un portable en offrant des disquettes Sony et un affichage à cristaux liquides de 80 colonnes.


1 commentaire:

  1. J'ai eu mon premier micro en 1981, un M23 du constructeur japonais SORD avec un spécifique écrit en Basic. Je disposais du tableur PIPS qui intégrait un petit langage de programmation. Outre le lecteur de disquette interne j'avais un disque dur externe Westinghouse. Mon imprimante était une Binder. Qu'est devenue la société Micro VR qui m'a permis de réaliser une informatisation réussie, ce qui n'était pas gagné à l'époque. Merci à eux.

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